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Après avoir quitté, en 2017, sa « maison mère », le label Tôt Ou Tard », créé par le frère d’armes Vincent Frèrebeau, Thomas a vogué seul pendant deux disques. Puis est arrivé le virus mondial, son confinement et, avec lui, une denrée à laquelle Fersen n’avait jusqu’alors jamais goûté : le temps. De nouveaux et insoupçonnés territoires de création s’ouvrent alors à lui, offrant de délicieux et addictifs moments de création. Calé dans son canapé, celui au fond de la maison, face au vert jardinet urbain, il s’est mis à écrire, penser, créer. Différemment.
Parfois l’oiseau arrive vite
Mais il peut aussi bien mettre de longues années
Avant de se décider
Changer de perspective. Envisager de ne plus faire de chansons, tout du moins d’albums dans le sens ou l’industrie le considère. Thomas fureteur-voyageur.
Ne pas se décourager
Attendre
De ce créatif temps-canapé est né, en un peu plus de deux ans, un livre en vers comme une grande chanson de 275 pages, presque-autobiographique : « Dieu sur Terre ». Puis le spectacle du même nom, mis en scène par Benjamin Lazar, joué au théâtre de l’Athénée en février 2023 et qui a parcouru la France jusqu’en février 2025.
Attendre s’il le faut pendant des années
La vitesse ou la lenteur de l’arrivée de l’oiseau
N’ayant aucun rapport
Avec la réussite du tableau
Lorsqu’en janvier 2023, 30 ans se sont écoulés depuis la sortie du « Bal des Oiseaux », Thomas se pose la légitime question de la célébration. Faire seul un disque anniversaire n’ayant, à ses yeux, aucun sens, il décide de revenir vers Vincent Frèrebeau, complice pour 9 de ses 11 albums studios. Heureux de ces retrouvailles, ce dernier lui confie sa vision : rendre hommage aux chansons du répertoire par une réalisation originale.
Quand l’oiseau arrive
S’il arrive
Observer le plus profond silence
Attendre que l’oiseau entre dans la cage
C’est ainsi qu’est arrivé Clément Ducol.
Et quand il est entré Fermer doucement la porte avec le pinceau
Puis effacer un à un tous les barreaux
En ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l’oiseau
Ducol, Thomas l’a rencontré à l’occasion de l’album des 15 ans de « Tôt ou tard » auquel il avait participé en reprenant une chanson d’Higelin avec Christian Olivier, des Têtes Raides. Loin de sa propre ‘punk-formation’ et de celle, autodidacte de l’ami-de-toujours, Joseph Racaille, Ducol vient du Conservatoire National supérieur de Lyon.
Faire ensuite le portrait de l’arbre
En choisissant la plus belle de ses branches
Pour l’oiseau
Lâcher prise comme idée directrice du « Choix de la Reine ». Thomas décide de se laisser (em)porter par le regard de Clément, Un choix qui, aussi étonnant que cela puisse paraître, va s’avérer pertinent puisqu’au final, cet album anniversaire est probablement l’autoportrait le plus fidèle jamais fait.
Peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
La poussière du soleil
Et le bruit des bêtes de l’herbe dans la chaleur de l’été
11 chansons, 10 classiques + 1 inédite, toutes choisies et déshabillées par Clément, puis recouvertes de ses arrangements joués par le Trio SR9, trio de percussionnistes fondé au Conservatoire National Supérieur de Lyon en 2012 et qui s’ était fait connaitre en 2015 avec un album de Bach joué au marimba. Marimba donc, mais aussi vibraphone, glockenspiel et même un piano customisé !
Et puis attendre que l’oiseau se décide à chanter
Si l’oiseau ne chante pas
C’est mauvais signe
Signe que le tableau est mauvais
Mais s’il chante c’est bon signe
Signe que vous pouvez signer
Le portrait est presque fini. Mais il manque quelque chose. Quelque chose de beau, quelque chose qui réunit. Ce seront les textes, ces fameux poèmes qui firent le délicieux sel du spectacle de Thomas à L’Athénée. Des textes extraits de ce long monologue en vers, mis en musique, comme un fil sonore invisible liant les chansons, faisant de ce disque l’incroyablement précise radiographie du parcours atypique d’un artiste hors cadre.
Alors vous arrachez tout doucement
Une des plumes de l’oiseau
Et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau
Jacques Prévert (beaucoup)
& Eric Jean-Jean (un peu)
© Vincent Delerm