Résumé

La metteuse en scène Eugénie Ravon et l’auteur-dramaturge Kevin Keiss, conçoivent un spectacle au titre-programme qu’ils souhaitent ancré dans les préoccupations de l’époque.

Ensemble, ils partent d’une considération évidente : rien ne nous semble plus personnel que nos émotions. Or, nos joies, nos larmes, nos pudeurs, nos colères sont-elles si intimes que nous le croyons? Comment sont-elles dictées, façonnées par les attentes de la société, de la communauté, de notre culture ?  Y’a-t-il des mélodies qui nous font tou-te-s pleurer ? Des évènements capables de tou-te-s nous révolter ? De quelles façons les réseaux sociaux, l’ère du virtuel permettent-ils de nouvelles stratégies émotionnelles ?

Prenant comme point de départ un accident à la naissance de la fille d’Eugénie, ils interrogent les grandes liturgies de la vie… Avec tendresse et humour ils passent à la loupe les paradoxes et les singularités de notre temps.

Entre fiction théâtrale et réalités biographiques, les sept acteur-rice-s de La Mécanique des émotions — qui ont entre 30 et 60 ans — se livrent à une enquête intime sur la façon dont nos émotions sont bien plus ambivalentes que des émoticônes. Tissant une pièce où la puissance des corps est aussi intense que le pouvoir des mots.

Avec Nathalie Bigorre, Morgane Bontemps, Stéphane Brel, Jules Garreau, Magaly Godenaire, Philippe Gouin, Eugénie Ravon

Dès 14 ans

Durée 1h45

Note d'intention • Eugénie Ravon

Eugenie Ravon

Au point de départ, il y a une expérience intime : j’ai eu un accident vasculaire cérébral à la naissance de ma fille. Cette expérience entre la vie et la mort, partagée entre la joie la plus intense et l’angoisse la plus terrible a constitué un télescopage émotionnel très puissant et très loin des injonctions classiques de la maternité. Elle est à l’origine de ma recherche.

Elle m’a poussé à m’intéresser plus généralement aux émotions ambivalentes, paradoxales et équivoques qui peuvent nous traverser lors des grandes étapes de notre vie comme les enterrements, les séparations, les deuils. Tous ces événements qui nous façonnent et qui construisent nos identités. Lors de ces moments, on peut ressentir souvent des sentiments intimes contradictoires, aux prises avec notre irrationnel, bien loin des règles morales et sociales. Ces instants de bascule sont le cœur du travail en improvisation avec les acteurs. C’est aussi la matière de départ de l’auteur, Kevin Keiss, qui écrit en va et vient constant avec le plateau.

John Cassavetes disait que « la folie c’est un individu qui n’arrive pas à jouer avec l’orchestre ». Je crois qu’on a tous eu des moments où l’on n’a pas joué avec l’orchestre. Où l’on a pu, pas su, où l’on a été à côté de ce que l’on attendait de nous. Où la durée de nos émotions aussi n’a pas été raccord avec ce qu’on considère comme la norme. Or, il y a des hontes enfantines qui ont duré 5 minutes et qui constituent des carrières artistiques entière, des amours qui ont duré 3 semaines et que l’on emportera jusqu’à son dernier souffle. Et les exemples ne manquent pas : désirer ardemment quelqu’un à l’enterrement d’un proche, ressentir du dégoût pour son enfant à la maternité alors que l’on vous demande de sourire pour la photo, ou encore rompre avec quelqu’un et passer sa vie à l’espionner sur les réseaux sociaux.

Notre dramaturgie s’intéresse à tous ces instants intimes inattendus à rebours des injonctions que l’on lit et entend fréquemment dans l’espace public. Ces injonctions qui lissent et normalisent nos affects pourtant complexes et surprenants. Dans une époque, où l’on peut se sentir presque anesthésié devant nos écrans tant nous sommes sollicités pour nous tirer les larmes, ce spectacle se pense comme un contre programme pour retrouver nos capacités à être ému et s’interroger également sur la manipulation de nos émotions intimes. Pour cela, je souhaite me servir des ressorts du théâtre, lieu par définition de la manipulation des sentiments du spectateur, car au théâtre comme sur les réseaux sociaux, on a un certain plaisir à être manipulateur et à manipuler.

Le récit intime de mon accident vasculaire constitue le point de départ d’une fiction autour de laquelle graviteront des figures intenses aux prises avec leurs émotions ambivalentes. Et dans cette fiction, il y aura, entrelacés, des pas de côté, parfois même des numéros, où l’on s’intéressera à la manipulation de nos émotions, notamment grâce aux outils du théâtre. Les acteurs glisseront donc régulièrement d’un registre à l’autre et cela sera perceptible dans la mise en scène qui pourra nous faire glisser d’une parole frontale et presque documentaire au quatrième mur. C’est une dramaturgie qui passe beaucoup par l’art de l’acteur et les sept acteurs au plateau à mes côtés, sont tous chevronnés et capables de passer d’un registre très intime à une grande puissance de théâtralité, capables aussi de faire affleurer l’humour dans les larmes et la joie dans le tragique. De même dans la scénographie on glissera également : un même lieu, blanc, assez abstrait et transitoire pourra constituer avec très peu d’éléments, un hôpital, puis un labo, puis un sauna. Avec des touches de bleu et d’or, elle pourra aussi, avec presque rien, nous faire basculer dans le rituel du deuil par exemple. Enfin, ces îlots émotionnels dissonants ont besoin de chair et de corps habités, j’ai donc fait appel à Garance Silve, chorégraphe, qui sera là tout au long de la création.
Eugénie Ravon

©Adnan Farzat

Écriture et dramaturgie • Kevin Keiss

Kevin Keiss passe son enfance à lire et relire L’Iliade et L’Odyssée. Quelques années plus tard, il obtient un magistère d’Antiquités Classiques (ENS/Sorbonne 4), puis poursuit un doctorat en Lettres Classiques à l’Université Paris 7-Denis Diderot sous la direction de Florence Dupont où il est allocataire chercheur.

En 2008, il intègre la section « dramaturgie » de l’École du Théâtre national de Strasbourg. Il est désormais professeur‑chercheur associé à l’université Bordeaux-Montaigne, coresponsable du Master en Études théâtrales. Ses pièces sont publiées aux éditions Actes Sud-Papiers, Heyoka Jeunesse Actes-Sud-Junior et aux Solitaires Intempestifs.

Depuis 2013, il est régulièrement accueilli en tant qu’auteur en résidence d’écriture à la Chartreuse – Centre national des écritures du spectacle. Là, il écrit plusieurs pièces notamment Ce qui nous reste du ciel, Actes Sud-Papiers/Léméac 2019, texte lauréat du Festival Jamais Lu à Paris et Montréal, donnée en lecture publique au Théâtre du Vieux-Colombier dans le cadre du Bureau des lecteurs de la Comédie-Française, invité par l’Institut Français du Chili et mis en scène dans le cadre du Festival Rebelion des las voces et des Rencontres de dramaturgies européennes à Santiago du Chili.

En 2015, Kevin Keiss cofonde avec Adrien Cornaggia, Riad Gahmi, Julie Ménard, Pauline Ribat et Yann Verburgh le collectif d’autrices et d’auteurs Traverse qui est depuis janvier 2019 associé au Centre dramatique national de Normandie‑Vire. Ils signent ensemble Pavillon noir que le collectif OS’O crée la saison dernière au Centquatre-Paris. En 2017, il intègre l’Académie TOTEM(s), programme visant à développer les écritures opératiques mis en place par Roland Auzet et Catherine Dan à la Chartreuse-Cnes. Il y écrit le livret Retour à l’effacement en collaboration avec le compositeur Antoine Fachard, joué par l’ensemble AskolSchönberg d’Amsterdam (Rencontres d’été 2018). S’en suivent deux livrets pour le Choeur de Radio France : Sortir des villes et Merlin Magicien raconte le Roi Arthur d’après Le Roi Arthur de Henry Purcell.

En tant qu’auteur, traducteur et dramaturge, il travaille en France avec Julie Berès pour Désobéir – Pièce d’actualité n° 9, (Désobéir, Radiorama France Culture réalisé avec Alexandre Plank et Julie Berès), pour Soleil Blanc, Élise Vigier pour Harlem Quartet, Baldwin/Avedon, entretiens imaginaires, Lucie Berelowitsch pour Rien ne se passe jamais comme prévu, avec Louis Arène sur les créations du Munstrum Théâtre mais aussi Laëtitia Guédon, Didier Girauldon et Jean-Pierre Vincent.

À l’étranger, il collabore entre autres avec Kouhei Narumi au Japon, Cristian Plana au Chili, Cornelia Rainer en Autriche et Sylvain Bélanger au Canada. Depuis 2011, il collabore comme auteur et dramaturge avec Maëlle Poésy sur toutes les pièces de la Cie Crossroad : Purgatoire à Ingolstadt d’après Marieluise Fleisser dont il signe la traduction, Candide, si c’est ça le meilleur des mondes dont il réalise l’adaptation/réécriture d’après Voltaire, Le Chant du cygne/L’Ours de Tchekhov (Studio-Théâtre de la Comedie‑Francaise) co-adapté avec Maëlle Poésy, Ceux qui errent ne se trompent pas, de Kevin Keiss (Festival d’Avignon IN 2016) Actes Sud-papiers, Lauréat Artcena 2016, Inoxydables de Julie Ménard et dernièrement Sous d’autres cieux de Kevin Keiss d’après L’Énéide de Virgile (Festival d’Avignon IN 2019), 7 minutes de S. Massini, Théâtre du Vieux Colombier, Comédie-Française en 2020.

Kevin Keiss est auteur/dramaturge associé à la Direction du Théâtre Dijon Bourgogne, Centre Dramatique National.

©JeanLouisFernandez

Dossier artistique

Production et soutiens

Production déléguée Théâtre Romain Rolland – Scène conventionnée
Coproduction Théâtre Dijon Bourgogne – Centre Dramatique National, Les Bords de Scènes – Grand-Orly Seine Bièvre, Créteil -Maison des Arts, EMC – Saint-Michel-sur-Orge, Théâtre Jacques Carat – Cachan, Maison des Arts du Léman – Thonon
Soutiens Ministère de la Culture – DRAC Île-de-France, Région Île-de-France, ADAMI Talent déclencheur, SPEDIDAM

Calendrier 2022/2023

Du 24 au 28 janvier 2023 TRR Villejuif (94)

2 février 2023 Théâtre Jacques Carat, Cachan (94)

4 février 2023 Les Bords de Scènes, Grand-Orly Seine Bièvre (91)

Du 21 au 25 février 2023 Théâtre Dijon Bourgogne, Centre Dramatique National (21)

♦ 28 février 2023 Maison des Arts du Léman, Thonon-les-Bains (74)

♦ 7 mars 2023 Théâtre de Fos, Fos-sur Mer (13)

♦ Du 12 au 14 avril 2023 Maison des Arts de Créteil (94)

♦ 18 au 19 avril 2023 Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines, scène nationale (78)